Les Justes d'Algérie
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Collectif des Avocats Belges du FLN

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Message  Admin Ven 26 Déc - 20:39

Discours de Monsieur Serge MOUREAUX

Source :
http://www.algerian-embassy.be/pdf/discours%20M.MOREAUX.pdf

Discours de Monsieur Serge MOUREAUX

membre du collectif des Avocats du FLN.
Madame la Présidente,
Excellences,
Chers Collègues,
Chers amis,


Le 1er novembre 2004 a marqué le cinquantième anniversaire du commencement de la guerre de libération du peuple algérien. Un peuple qui avait subi pendant des décennies le joug colonial et la répression qui en était le corollaire naturel. Car le déclenchement de cette insurrection armée et violente n’a pas été lé fruit du hasard, ni celui d’une rébellion absurde contre la modernité et la civilisation, ni l’expression d’une quelconque sauvagerie, ni la conséquence d’un complot international téléguidant de l’extérieur des naïfs ou des fantoches. Il a été le sursaut d’un peuple maltraité, privé de justice et de fraternité, en quête de cette même liberté pour laquelle tant des siens étaient venus combattre et mourir en Europe.
Le système d’exploitation coloniale, l’asservissement d’un peuple aux fantasmes racistes de l’Occident, l’aveuglement des pieds noirs devant la revendication d’égalité de la population algérienne sont seuls responsables de cette révolution, de son cortège mortifère, des assassinats et des tortures.
Le dire aujourd’hui est pour certains, banal. Ce ne l’était pas en 1954. Ils étaient peu nombreux ceux qui, de 1954 à 1962, ont osé tenir ce discours et agir en conséquence en se mettant à la disposition de la Fédération de France du FLN, fer de lance en Europe de la guerre de libération.
Avocats, porteurs de valises et d’espoir, passeurs de frontières, militants des comités d’aide ou pour la paix, ils furent certes peu nombreux mais leur action fut, je crois,
déterminante et efficace. Et même si leur nombre était réduit, l’organisation de l’époque, le cloisonnement très strict, font qu’il est difficile, voire impossible, d’en dresser une liste exhaustive.
Notre collectif d’avocats belges où figuraient comme permanents Marc DE KOCK, Cécile DRAPS et André MERCHIE, a œuvré aux côtés des OUSSEDIK, BENABDALLAH, VERGES, COURREGE, ZAVRIAN ou BENI MERAD, du collectif établi en France, dans la défense des combattants et l’organisation des détentions. Pratiquant cette défense de rupture qui attaquait dans sa chair vive et son arrogance le système répressif colonial, elle a aussi sauvé de l’exécution, de l’internement ou des traitements inhumains et dégradants des dizaines de militants.
Empêcher que Rabah OUAKLI, Tahar ZAOUCHE, Arezki ABDI ou Mohamed ARBAOUI, ne soient guillotinés fut l’une des tâches accomplies par le collectif belge et les comités d’aide mobilisés.
Sauver et assister dans leur calvaire les condamnés à morts de Douai parmi lesquels, aux côtés du colonel Ahmed BENCHERIF, figuraient des responsables et militants
zonaux de l’organisation spéciale de la Fédération, comme RAHMOUNI, AINOUZ, SKALI ou TAZEBINT, fut une tâche prenante mais indispensable.
C’est notamment en Belgique, à Etterbeek, à Uccle ou à Lustin que se décidaient la politique et l’action dans les prétoires et les prisons.
Sous la houlette du responsables pour la Belgique de la Fédération de France, Abdelmadjid TITOUCHE, (Marc DUJARDIN de son nom de guerre) se réunissaient clandestinement les avocats français et belges du Collectif avec ALAIN (Ali HAROUN), PEDRO (Omar LADLANI) et le responsable OMAR (Omar BOUDAOUD) trois des cinq formant la direction de la Fédération de France, afin d’analyser les situations et de définir les objectifs.
Organisation des colloques juridiques internationaux de Bruxelles et de Rome, ou, en novembre 1961, le déclenchement dans toutes les prisons, le même jour à la même heure, d’une grève générale de la faim des détenus algériens contre le projet de partition de l’Algérie lancé par un des féaux de DE GAULLE, le Ministre PEYREFITTE. Cette
décision fut prise à Bruxelles et immédiatement relayée dans toutes les détentions par le collectif.
Mais ce type de réunion n’aurait pu se tenir sans les réseaux qui assuraient les transports des hommes et des documents, les passages de frontières ou les évasions.
Des militants comme Luc SOMERHAUSEN (ALEX pendant la guerre), Jacques NAGELS, Maggy RAYET, Irénée JACMAIN et son mari, Pierre LEGREVE, Jean DONEUX, Jean VAN LIERDE, Lucien PARY et mon épouse Henriette ont accompli mille et une tâche indispensables et dangereuses, hébergé les responsables clandestins, assuré les passages de frontières.
Sans ces gens-là, qui sont pour moi l’honneur de la démocratie belge par leur courage et leur abnégation, leur sens de la justice qui a quelque peu racheté le racisme ambiant, l’action n’eût pas été ce qu’elle fut.

Qu’on m’entende bien : ce ne sont pas les Blges ou les Fançais des collectifs ou des réseaux qui ont assuré la victoire finale des accords d’Evian. Ce sont les Agériens eux-
mêmes, grâce à l’organisation efficace, montée comme une horloge par le peuple algérien tout entier, qui ont reconquis leur dignité confisquée.
Nous avons été quelques-uns à reconnaître en temps utile la voix de la justice et à la répercuter, puis à servir comme militants en suivants, à la lettre, les dirrectives du
GPRA ou de la Fédération. Nous avons eu l’humilité d’écouter la voix des opprimés et de cesser de nous gargariser des grandes tirades sur la civilisation occidentale.
Nous avons tenté alors de relayer l’intelligence et la sensibilité d’un peuple réduit absurdement en esclavage.
En mai 1956, dans une revue universitaire de l’Université Libre de Bruxelles, je préconisais les négociations avec le F.L.N. Car je pouvaits souligner que la Caisse Algérienne de Crédit Agricole bénéficiait aux colons européens à raison de 99%.
Qu’à l’Université d’Alger, sur 5000 étudiants, il y avait 500 musulmans. Que sur 9 millions d’habitants musulmans, seuls 19% des enfants étaient scolarisés, que le salaire des ouvriers algériens était dérisoire et qu’il y avait 1.500.000 chômeurs musulmans.

Quand on glose aujourd’jhui à propos de l’Algérie, on oublie de préciser que la scolarisation y atteint 80% sur une population de 35 millions d’âmes.
Assurément, le couplet sur l’action civilisation du colonialisme est et reste une véritable escroquerie intellectuelle.
Et croyez-moi, aucun de ceux qui ont aidé l’Algérie à maîtriser son destin n’en a de regrets.
Je ne puis cependant passer sous silence le prix payé pour tout cela. Les ratissages, les bombardements, les camps de concentration, les exécutions sommaires ou ciblées, les disparitions organisées, la torture systématisée, les corvées de bois, les enfants et les femmes assassinés.
Même ici, ce fut le cas.
Ne parlons pas des sanctions prises contre nous, Cécile DRAPS et moi, par le tribunal militaire de Lille. Car, en fin de compte, c’est dérisoire. Mais Me POPIE, assassiné à
Alger, Me Ould AOUDIA à Paris, le Professeur LAPERCHES à Liège, et mon ami Akli AISSIOU, étudiant en 7ème année de médecine à l’Université Libre de Bruxelles, assassiné à Ixelles, rue Longue Vie par un tueur des services spéciaux français sur ordre du gouvernement du Général DE GAULLE.
Tous ces jeunes militants, battus, torturés, exécutés, c’est à eux qu’il faut dédier cette célèbration du 1er novembre 1954.
Alors, Madame la Présidente, je vous demandrai en conclusion deux choses.
La première est de proposer à nos trois grandes universités de créer une bourse Akli AISSIOU ouverte à un étudiant algérien en médecine.
La seconde, de promouvoir la création d’une fondation pluraliste Professeur Laperches, dirigée par un conseil paritaire algéro-belge, dotée d’un secrétariat, d’archives et de chercheurs universitaires qui rassemblerait les archives belges de l’aide au FLN, les classerait et les exploiterait autrement qu’en les confiant à la poussière des greniers ou des rayonnages.
Mes pensées finales iront à tois algériens qui ont profondément marqué mon esprit par leur intelligence, leur sensibilité et leur culture, au point qu’après les avoir rencontrés, la fréquentation de l’imbécillité méprisante et raciste de certains devient insupportable.
Rahmoune DEKKAR et Abdelkader MAACHOU d’abord, responsables syndicaux de l’UGTA, pendant la guerre de libération, hommes à la dialectique serrée, révolutionnaires conscients, mais surtout hommes à la pensée libre et militante.
Et alors, comment esquiver le souvenir impérissable de ce gigantesque homme de culture qu’était KATEB YACINE, qui m’a fasciné par son œuvre comme par la poésie
incommunicable de son discours, KATEB YACINE, l’imprécateur kabyle qui se posait des questions sur la coexistence fatale à Jérusalem des trois grandes religions
monothéistes.
Les islamistes ont profané sa tombe. Mais je suis convaincu qu’il repose en paix…
C’est son Algérie, celle qu’il a rêvée, qui brûle dans mon cœur.

Serge MOUREAUX
10 novembre 2004


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